Anne-Laure Giraudeau : L’avocate-entrepreneuse
Octobre 2022
« C’est à la fois une bonne technicienne, une juriste intuitive et une gestionnaire de projets créative et très organisée. Une vraie touche-à-tout »
« La relation avec les clients est au cœur de notre métier », poursuit celle qui n’hésite pas à partager sa vision, ses conseils business, mais aussi les rebondissements de son quotidien d’« avocapreneuse » ou son état d’esprit du moment sur son influent profil LinkedIn. Mais qu’on ne s’y trompe pas. Derrière cette habile communicante qui ne compte pas ses heures se cache une juriste aux compétences pointues. Une femme de droit qui, dès son plus jeune âge, rêve de justice.
« Je me passionne pour le droit »
Pas pour la robe d’avocat, mais plutôt pour celle de magistrat. Ou bien pour s’engager dans la vie publique… C’est dans cet état d’esprit que la jeune Nancéienne se lance dans un double cursus en droit et en science politique. « Quand je réalise que la politique est davantage un monde de réseau que de compétences et de mérite, je décide de passer à autre chose », explique celle qui s’engage aux côtés des jeunes socialistes et qui conservera cette volonté d’agir en faveur d’un certain progrès social. Déterminée, l’étudiante s’investit pleinement dans ses études. « Je me passionne pour le droit civil, la notion de responsabilité, de contrat… J’y trouve un réel épanouissement intellectuel », raconte-t-elle, soulignant n’avoir qu’un objectif en tête : la magistrature.
Après un cursus universitaire sans fautes, Anne-Laure Giraudeau échoue au concours de l’ENM en 2007. Et si c’était un signe ? « Je prends conscience que, au fond, j’aspire à être libre, à voyager, à découvrir le monde et que c’est incompatible avec le métier de magistrat. Pour trouver ma voie, je multiplie les expériences : master 2 de droit international, stage en cabinet d’avocats, mission d’assistante de justice au tribunal… », se souvient-elle. Après une année à la fois riche et bien remplie, l’étudiante décide de passer le barreau. Sans encombre.
« Elle fédère et impulse une dynamique avec une énergie incroyable »
Quand on veut, on peut
Une trajectoire toute tracée ? Que nenni. Avant de commencer sa carrière d’avocat, la jeune femme décide de partir un an en Australie pour découvrir, voyager, s’inspirer. Mais cette besogneuse avide de connaissances n’a pas l’intention de se tourner les pouces des semaines durant. « Ce n’était pas prévu, mais je provoque une rencontre avec le bâtonnier de Sydney et, grâce à lui, je suis engagée pendant six mois comme stagiaire dans l’un des plus importants cabinets du pays. C’est totalement surréaliste, explique l’étudiante partie de France avec un simple sac à dos de baroudeuse. L’expérience est incroyable, elle me permet d’apprendre l’anglais, de me familiariser avec les structures internationales. Je suis jeune, française, mon anglais est approximatif, on me confie les missions de recherche les plus ingrates et, en même temps, on m’amène à tous les rendez-vous. J’adore ça. » Pendant six mois, Anne-Laure Giraudeau s’habitue à l’atmosphère singulière des cabinets internationaux, à la vision business et au sens du travail qui y règnent. Au sein de cette structure profondément anglo-saxonne, elle prend conscience de l’aspect entrepreneurial du métier. « Je réalise que tout est possible. Et, surtout, que quand on veut, on peut », se souvient celle qui, en 2010, de retour en France, termine sa formation à l’école du barreau et cherche à rejoindre un cabinet international.
« C’est une très bonne technicienne qui a toujours soif de se renouveler… J’ai croisé peu de jeunes avocats avec cette réelle fibre entrepreneuriale et ce côté anticonformiste »
Des opérations internationales complexes
« En 2015, notre terrain de jeux est énorme, les dossiers stratégiques et les enjeux très importants. » Oui mais voilà, l’avocate envisage l’avenir. Pas question de s’associer, elle aime trop sa liberté. Pas question non plus de rejoindre un cabinet concurrent, elle est trop fidèle et trop reconnaissante envers cette maison qui l’a vue grandir. Anne-Laure Giraudeau veut changer de cap, relever de nouveaux défis, voler de ses propres ailes et rentrer en France.
Se consacrer aux professionnels de la santé
« Elle est à l'écoute de ses clients et accompagne ceux qui n’ont pas toujours une vision entrepreneuriale dans le développement de leurs projets, la structure de leur activité… Elle arrive à intégrer les codes de l’entreprise au monde médical »
« Au bout de trois ans, Loi & Moi se développe naturellement, si bien que je décide de me consacrer au déploiement de mon activité d’avocate, note l’intéressée. Au même moment, je suis contactée pour accompagner une opération dans le domaine de la santé. Une révélation. » Avec ses règles singulières, la santé est un secteur sensible. Et ça tombe bien, Anne-Laure Giraudeau aime les mécanismes intellectuels complexes et les projets riches de sens. « Je réalise que c’est un univers qui manque de conseil en droit des affaires », explique l’avocate qui, dès l’année 2021, épaule exclusivement des acteurs de la santé – médecins, kinésithérapeutes, infirmières…– dans le cadre de leurs initiatives entrepreneuriales. « Elle a une vraie capacité à saisir les opportunités », assure Alexander Olliges, soulignant sa faculté à changer, à s’adapter à une nouvelle spécialisation, un nouveau secteur, un nouvel environnement.
« Elle connaît nos contraintes et ne se focalise pas juste sur la rentabilité d’une opération. Elle veut que les choses se passent bien. Elle est à la fois très professionnelle et très humaine »
« Gestionnaire de projets »
En quelques mois, Anne-Laure Giraudeau est sollicitée par plusieurs professionnels de la santé pour des projets divers : développement de plateaux techniques, construction d’une maison médicale, création d'activités annexes… Quelle procédure suivre ? Comment se positionner sur le marché ? Quels sont les enjeux derrière une potentielle association ? Anne-Laure Giraudeau apporte des réponses concrètes, pragmatiques, y compris lorsque le sujet est complexe. « Elle est réellement à l'écoute de ses clients et accompagne ceux qui n’ont pas toujours une vision entrepreneuriale dans le développement de leurs projets, la structure de leur activité… Elle arrive à intégrer les codes de l’entreprise au monde médical », assure sa consœur Agathe Niqueux, spécialisée en droit de la santé. Pas question de se limiter à une problématique précise. Proactive dans les dossiers qu’elle prend en main, Anne-Laure Giraudeau établit un planning, fixe des délais, discute avec les différents intervenants, participe aux réunions entre associés… « Elle fédère et impulse une dynamique avec une énergie incroyable, témoigne sa cliente, Marion Busson. Elle m’a épaulée lorsque j’ai décidé de devenir associée au sein de la structure dans laquelle j’exerçais déjà. Il était important pour moi de comprendre comment appréhender cette association, de fixer les bases du futur, de faire preuve de pédagogie avec mes futurs associés. A partir du moment où Anne-Laure est rentrée dans le jeu, ça a totalement accéléré le projet. » « Je suis là pour faire en sorte que l’opération soit menée à bien et dans les meilleures conditions, soutient l’intéressée. Ça dépasse forcément le cadre juridique. » Lucide, Anne-Laure Giraudeau comprend rapidement qu’elle ne peut répondre avec précision à l’ensemble des questions de ses clients et tisse alors un réseau de confrères experts en droit de la santé – comme Agathe Niqueux ou Sarah Hanffou – avec qui elle échange au quotidien.
« Elle n’a pas de plan prédéfini dans sa tête, pas de codes préétablis. Elle est très agile. Que ce soit dans les dossiers ou dans sa façon de gérer son activité. Avec elle, le champ des possibles est vaste »
Agile
Pleinement investie et alignée avec ses aspirations, Anne-Laure Giraudeau imagine, courant 2023, un club consacré aux professionnels de la santé qui souhaitent entreprendre : Doctopreneurs. Conseils, retours d'expérience, podcasts, événements… L’organisation a pour objectif de casser les barrières de l’entrepreneuriat pour les acteurs du monde médical. Principalement ceux qui n’osent pas se lancer. Autres objectifs de ce club, fondé avec Agathe Niqueux et Sarah Hanffou : intégrer les codes du droit des entreprises au monde médical, aider les professionnels de la santé à développer une vision business et ainsi faire évoluer les mentalités. Encore un joli projet pour Anne-Laure Giraudeau qui dispose aujourd’hui d’une certaine réputation auprès des professionnels de santé. La preuve : Giraudeau Partner in Law intervient aux quatre coins de l’Hexagone. Pour le plus grand bonheur de sa fondatrice qui aspire à créer une entreprise pérenne et, pourquoi pas, à s’associer avec un ou plusieurs confrères dotés de la même vision et des mêmes valeurs qu’elle. « Elle n’a pas de plan prédéfini dans sa tête, pas de codes préétablis, témoigne Sarah Hanffou avec amitié. Elle est très agile. Que ce soit dans les dossiers ou dans sa façon de gérer son activité. Avec elle, le champ des possibles est vaste. » « C’est une personne qui gagne réellement à être connue. Je la recommande à mes confrères les yeux fermés », assure de son côté l’ophtalmologiste Pierre-Jean Bertaux. Le secret d’Anne-Laure Giraudeau ? Son agenda minutieusement chronométré. Son expérience qui lui rappelle régulièrement que, pour être performante sur la durée, il est bon de souffler. De lire, écrire, jardiner, faire du sport, passer du temps avec ses proches. De s’inspirer des autres. Comme une intarissable source de créativité. « “Le droit mène à tout, à condition d’en sortir.” Anne-Laure Giraudeau incarne parfaitement ce dicton », conclut Gilles Dusemon. Remarquable.
Crédit photos : @MorganeLaunay